28 juillet 2007

J'aurais voulu être un autiste

Myriam?

Le 29 janvier. Je ne vous dis pas l'année, ça ne servirait à rien. Je ne m'en rappelle pas de toute façon. Mais CE 29 janvier, c'était la première fois que je consentais à l'appeler par son prénom.

À travers mes oreilles en chou-fleur, une sonorité qui traversait mon crâne jusqu'alors trop peu réceptif, trop opaque, trop plein de trucs obsolètes, ridicules. Trop plein de matière moribonde passée date.

Tu es ici, Myriam?

«Une fleur beige, tu parles d'un concept.»

C'est tout ce que j'ai tiré d'elle ce soir-là. Une dénonciation horticole.

«Oui, mais beige c'est pas si mal, non?»

Elle a jamais répondu à ma question.

Pourtant, son regard disait autre chose. Elle était là-bas, dans le monde des fleurs beiges, celles qui se posent des questions différentes, qui voient et mathématisent autrement. J'ai lancé une autre perche, une dernière et puis j'arrête.

«Pourquoi beige? » De toutes les couleurs, elle aurait pu mieux choisir non? Quelque chose de plus vivant, quelque chose qui amorce autre chose, une couleur plus... ouais vivante voilà.

Elle a longtemps regardé droit devant. Pas si longtemps, juste assez pour refaire le monde à sa façon 177 fois, en ne m'incluant jamais, car moi je porte pas le beige, je porte le transparent, cette couleur inexistante, inodore, incolore, socialement déficiente.

Le lendemain, dès mon lever j'allais faire autre chose. Ouvrir mon journal, m'absorber dans les mots croisés, mon horoscope, la phrase du jour. J'en étais rendu à me demander si... en fait je me demandais rien du tout, je ne faisais que m'allouer du temps d'emprunt. Myriam était là, sans y être vraiment. C'est alors qu'elle me répondit. Pas nécessairement à moi, mais elle répondit ceci:

«Le beige, c'est un blanc qui a eu trop chaud.»

J'ai posé tant d'autres questions. Elle était là, à fixer à travers moi tout ce qui se passait, en prenant grand soin de m'extraire de sa réalité cognitive.

Le 29 janvier. Sa mère l'avait abandonnée dès le 30, treize années plus tôt. Restait moi. C'est vous dire s'il restait presque rien. Car ce monde atrophié qu'elle s'est créé, il est maintes fois plus réussi que le mien. Allez lui expliquer ça.

Et expliquez-moi. Mais c'est vrai que c'est trop chaud.

27 juillet 2007

Si j'avais les ailes d'une truite, je partirais pour...

Dans toute sa candeur, l'équipe complète du Fond de l'hère vous exposait ses débats houleux, ses questionnements ostentatoires (ça marche pas mais ça fait vachement beau) et ses überquestionnements sur l'achat d'un chandail arborant une truite. Ou une truite arborant un chandail, c'est selon, selon votre degré de circoncision.

Mais la véritable question se pose ici, à froid, gros Jean comme devant, prendrez vous un Super 7 avec ça?

La question : si une truite tombe dans la forêt, arborant fièrement un chandail avec mon faciès dessus (c'est pas un trip d'égo c'est une question là, allez pas réveillez vos mères en vain); bref, si si si et seulement si, quel âge a le capitaine?

Ayant passé trois jours avec le même chandail de truite collé au corps (lavé avec amour et savon, mais surtout savon), j'en suis venu à un constat consternant, au bas mot.

Les gens ne me regardent plus dans les yeux lorsqu'ils m'introspectent, m'oscultent, m'occultent et me jugent. Et oui justement, juge-moi donc. Rarement mon corps voluptueux et racé (rappelez vous, je peux effacer les commentaires désagréables) aura été aussi déshabillé, désiré, voulu, entériné et tergiversé que dans les derniers jours. C'est beau de voir les gens se questionner sur l'utilité d'un geste aussi FRANC et SOLIDE que de se tatouer sur le corps - ou le chandail c'est la mègne affaire - un être qui a survécu à des millions d'années d'évolution, d'infrastructures et de néo-libéralisme.

Venez me dire qu'après ça une truite c'est rien. Venez me dire. Ah oui, ramenez du lait aussi, y'en a pu et y'a soif.

25 juillet 2007

The truite is out there...

Comment faire passer le blues d'un anniversaire mal placé dans l'agenda des vacances?

Simple.

Se rendre à l'expo agricole de St-Hyacinthe avec famille et amis, amuser les enfants dans les manèges, se rendre malade en ingurgitant moult quantités de sucres mal famés et surtout, SURTOUT, compléter une quête.

L'an passé, la quête était simple: le loup. Facile, ça se vend à tous les coins de rues, un gaminet arborant le physique gracieux de ce fauve incompris et dépressif. (Oui oui je sais, gaminet n'existe pas mais je suis en enfant des années 70 alors j'ai le droit, bon.)

Bref cette année, challenge: Y faut une truite. Une truite heureuse, lancinante, pétante de santé, qui s'extirpe de l'eau avec cette fougue qu'ont les jeunes truites à... à.... bin à sortir de l'eau, genre.

Euréka! Dans cette petite boutique remplie de vendeurs trop contents d'être heureux, on me dirige au fond de la baraque ou le propriétaire de l'endroit extirpe de ses archives personnelles une «magnifique» image de truite. Prête à être imprimée on ze spot.

Si si, mon gaminet sera fait maison, juste pour moi. Imprimé à chaud pendant que j'attends sur un chandail blanc qu'aura confectionné avec amour et dévotion un enfant analphabète et démuni dans un sweat shop de Delhi pour payer les dettes contractées avec autant d'amour et de dévotion par son paternel. (Le pire dans tout ça, c'est que je pourrais avoir raison. Ça colle pas avec la réalité de personne ici hein? Essayez ça, 14 heures sur la même chaise un travail répétitif pour 1$. Venez vous plaindre de vos conditions de travail après ça et on va s'asseoir avec un café «équitable» pour parler de la vraie vie.)


Et dans toute cette histoire d'achat intempestif, la cerise sur Mats Sundin: ledit propriétaire me réconforte sur ma décision, vantant à grand renfort d'esclaffes mon choix. «Très belle image monsieur. Les couleurs sont superbes.» J'avais presque envie de lui offrir mes services de gardiennage d'enfants pour qu'il sorte un peu plus voir le monde et se refaire une santé de références culturelles, mais bon qui suis-je pour juger, on est si peu de chose et anyway j'ai eu la carte «Ne passez pas go, ne réclamez pas 200», alors c'était foutu.

En plus, il m'a appelé «chef» lors de notre transaction financière. C'est pas beau ça? C'est pas beau? Ça vous émeuve. Émute. Émouvre. Bref, ça vous charive l'intérieur comme un début de gastroentérite.

La barre est haute pour la quête de 2008. Une chèvre? Un chou? Monsieur Séguin nuvite? Ah, le temps joue tellement toujours contre nous...

23 juillet 2007

J'ai même pas toutes mes dents

Considérant qu'il y en a une qui a littéralement explosé dans les mains d'un dentiste vampire démagogue et ultramontain qui n'a eu d'autre alternative que m'envoyer à l'hosto ou 172 stagiaires en canaux de tout genre m'ont drillé la bouche encore plus lentement qu'une poignée de cols bleus autour d'un nid de poutre.

J'ai pas toutes mes dents, alors bon l'adage ne colle pas. Que reste-t-il de ces 37 ans?

Les 37 voies du Seigneur sont impénétrables, même décemment lubrifiées.

Marche pas.

Les 37 doigts de la main? Marche pas plus, et ça coûterait cher en gant Isotoner (rappelez vous, les gants pas chauds, pas beaux qui font de si belles mains et promettent de si belles engelures à la belle saison).

Bon quoi d'autre?

37,2 le matin? Cibole, ces temps ci c'est beau s'il fait ,2 le matin, on repassera.

Les 37 commandements? Je me rends de justesse à 22, avec «tu ne tonitrueras pas ton mécontentement à la volée, tel un javelot». Même la Bible et ses succédanés ne sont d'aucun réconfort.

La société n'est pas faite pour les mi-trentenaires, vous voyez bien.

Au moins j'ai des rabais chez Pharmescroc et Pharmalaprix avec ma carte «pilosité dans les tons fermes de gris». Soudainement le macaron baba-cool «l'euthanasie après 40 ans, j'y crois» que je portais fièrement à l'adolescence semble moins source d'excitation et d'envolées oratoires prépubères.

Bon suffit, je retourne à mon épisode enregistré de Virginie. Les adolescents de secondaire 4 qui ont 25 ans et le jeu macabre de Marcel Leboeuf m'aident un peu à passer le malaise.

C'est quoi des nodules exactement?

Fais gaffe, Eugène

Je lui avais bien dit de se méfier des objets tranchants.

La suite, à lire dans les Chroniques de l'ascenseur.



Pink Floyd, Careful with that axe, Eugene.

20 juillet 2007

Une autre preuve que la fin du monde approche

... et accessoirement, une preuve que les beignes ne sont pas nécessairement ceux qui sèchent dans le présentoir prévu à cet effet.

La citation : «Nos clients attendent un service rapide et pratique». L'espèce humaine est sur la bonne voie, clairement. Ne passez pas gros, ne réclamez pas 200$.

Cliquez sur l'image pour une version plus lisible. Mais soyez avertis, ça n'en vaut pas la peine. Vous aurez été prévenus, ne m'envoyez pas vos factures de thérapeutes ou de concierges, ramassez vos dégâts vous-mêmes, vous êtes grands et vaccinés.

19 juillet 2007

Le plan

- Vous avez certainement un plan de carrière, jeune homme?

- Un comment?

- Un plan de carrière. Vous voulez être où dans 10 ans?

- En état respiratoire, ce sera déjà ça.

- Oui, évidemment, ahahah (rire forcé). Mais sérieusement?

- Bin c'est sérieux d'être en vie non ?

- Bon. Donc, votre plan?

- Euh... Eh bien je pensais à ça ce matin en frôlant la mort et...

- Vous est arrivé quelque chose, ciel!

- Ah, non non. Je marchais sur le bord du trottoir, vous savez, sur le bord vraiment. De chaque côté, un ravin de 1000 kilomètres, faut pas mettre le pied en dehors, ce genre de chose. Vous savez, frôler la mort là.

- Soyons sérieux.

- Bin je le suis. Z'avez jamais frôlé la mort comme ça?

- Je déduis avec tristesse que vous n'êtes pas sérieux pour votre avenir jeune homme.

- Vous avez jamais marché près d'un ravin de 1000 km, de toute évidence. Vous devriez, ça replace les priorités drôlement. Surtout sur un coin de rue, à partir de là, faut piler sur les lignes blanches sinon des crocodiles sanguinaires vous coupent les jambes au mollet et...

- Et vos REER?

- Chut. Dites le pas, j'en ai pris. Pour couvrir les frais d'expédition de l'équipe de spéléologues qui viendra me chercher au fond.

- Bon, je crois que je parle dans le vide.

- Parlez pas du vide, j'ai le vertige je pourrais basculer. J'ai pas encore cotisé assez, pour l'instant j'ai assez pour qu'un demi-spéléologue vienne me chercher. Vous connaissez la rareté des spéléologues-tronc ces temps-ci? C'est rare comme l'intégrité.

- Je ne vous reconduis pas, vous connaissez le chemin.

- Oui merci. Votre fenêtre ouvre plus grand?

18 juillet 2007

Si j'avais les ailes d'un ange...

... je partirais pas pour Québec pantoute.

Vous êtes un ange, vous iriez là vraiment? Rien contre la place. C'est juste que bon... tant qu'à avoir la possibilité d'aller comme bon me semble j'irais...

J'irais écoeurer un pilote de ballon tiens. Ça a au moins l'avantage de faire de la belle conversation, et les photos sont époustouflantes. Voyez plutôt.
Vous avez vu? Ça bat un souper au Château Frontenac ça!

Bah, chiâlez comme vous voulez, vous êtes tous jaloux. Si si. Essayez voir, on s'en reparlera. Je vous laisse, j'ai un bison à tondre.

13 juillet 2007

Les fautes d'autographe

Comment se faire dédicacer un livre sans se fatiguer?

La question se pose.

Je me déplace à une librairie obscure, sise au 277 Ste-Catherine Est, juste à côté de l'endroit où se trémoussaient naguère de jeunes hommes virils au bout de leur longue-vue.

J'entre, gêné, évidemment.

- On peut vous servir? Vous cherchez quoi, on a moins de 100$ dans la caisse.

- Wôôôô, les nerfs le poodle. Je cherche un livre.

- Vraiment?

- C'est pas pour moi hein. C'est pour un ami. Moi j'ai pas de problème.

- Bien sûr monsieur. Et votre ami il chercherait quoi, mettons?

- Bin mettons qu'il chercherait un livre, euh... gros comme ça.

- C'est pas bin gros. Il est rachitique votre ami? Il se fait vomir entre deux bouchées?

- J'en sais rien moi s'il se fait vomir, oh ! Je cherche un livre gros comme ça. Vous avez?

- On en a plein. Un titre tiens, ça vous tente pas de me donner un titre?

- La grosse femme d'à côté est enceinte.

- On a ça, sous les «T», cherchez dans Cape Cod.

- Mais non c'est pas ça. C'est avant les «T». C'est dans les «R». Comme dans lipposuccion.

- Sur la petite table dans l'entrée. Plus évident que ça, il vous saute au visage et vous déglobe les yeux.

- Merci.

Je mets la main dessus enfin. Mon ami va être content. Il va arrêter de se faire vomir et va lire un peu. Mais pas moi hein, lire c'est un peu «out». J'attends le film. Paraît que Brad Pitre a été approché pour jouer le rôle de la pagination. Ça va être tellement excellent.

Mais j'avais pas fini.

- Je voudrais faire dédaigner le livre.

- Dédaigner? Vous voulez dire dédicacer sans doute?

- Non non, dédaigner. Je connais très bien l'auteur vous savez, nos mères ne se fréquentaient pas du tout. Il dédicace pas, il dédaigne.

- Laissez le moi deux jours, je vous le ferai dédaigner alors.

- Non j'ai pas le temps, mon ami maigrit de jour en jour. Faxez moi la dédaignation, je ferai avec.

- Ça fera 13,50$.

- J'ai pour 2,55$ de bouteilles vides.

- On déduit alors.

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Exil au Rappazhistan, tome 1, de Frédéric Rappaz. En vente dans toutes les boutiques situées au 277 Ste-Catherine Est. Celui qui aime taquine, vous aurez compris.

12 juillet 2007

Avignon, mon cul!

Sur le pont d'Avignon, l'on y danse, l'on y danse
Sur le pont d'Avignon, l'on y danse tous en rond.
Les beaux messieurs font comme ça...

Ouais bin les beaux messieurs ils ont pas fait 10 fois le Pont Champlain en trois jours hein.


Les ponts, c'est carrément surfait. On devrait abolir ça et tout remplacer par des espaces hélicoptés tiens. L'avantage avec la voie aérienne, c'est que 13 taxis excités essaient pas de te doubler à 12 km heure dans une ligne d'attente pour prendre la sortie A123 qui mène à trois chemins de gravelle ou trois rasés et un tondu attendent sur l'accotement que leur moteur cesse de surchauffer.

On danse en rond en effet. L'an prochain c'est décidé, j'achète un métro et je m'installe à Laval. Là, ça roule!

7 juillet 2007

Chroniques de l'ascenceur: jour 8620... ouais encore toujours

C'est quoi les Chroniques de l'ascenseur ?

Pour voir toutes les Chroniques, on va ici.

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Vous pensiez que j'étais absent, hein? Absent d'ici. Ouais j'étais absent.

Fallait la pause. Fallait la pause dans mon historique personnel. Fallait la pause pour mieux raconter, reprendre mon souffle. Mon frère, Charlotte, tout ça.

C'était un peu trop en même temps. Trop de nazis cons avec leur baîlle-o-nettes, trop de personnages secondaires, tertiaires, hop! embarquez ici, on vous débarque plus tard.

Je prends la pause. Je la réclame, je l'invective. Elle est à moi.

Vous voulez connaître mes origines? Je ne les connais même pas. Je vous en invente une tiens. Pour tenir le rythme, pour tenir l'intérêt tiens. Parce que l'intérêt, dans cet instant précis du temps qui se précipite, c'est tout ce qui me tient debout. C'est tout ce qui me tient accroupi. C'est tout ce qui me tient.

Mes origines ça ressemble à ça.

Il y a de cela fort longtemps....

Bref, ils se faisaient chier. Et ils se sont dit, dans leur bravourde légendaire: "Si on en faisait un autre?" Grand bien leur fasse. Cris, hurlements, amenez moi un gallon de sève mammaire que je m'abreuve.

J'imagine que c'était comme ça. Ils ont dû répéter l'expérience, j'ai un frère semble-t-il.

Question: Quel est le nombre "x" pour s'apercevoir qu'une expérience est un échec? La réponse dans mon cas est deux. Deux.

Deux, c'est deux fois plus fort. Ou deux fois plus faible. Ça dépend de la prémisse.

Oh merde je disjoncte. C'est quoi ces foutus trucs bleus?


4 juillet 2007

Démunis, unissez-vous!

Hum...

Panne d'internet totale aujourd'hui; quelques étages de gens en peine, totalement démunis.

On fait quoi? On ne peut plus bidouiller, tripouiller, insérer, coller, supprimer, déplacer, contrôle-alt-deleter.

Alors on a l'air de ce qu'on a l'air, des gros rats qui entament une drôle de danse et qui rêvent de la maison.

J'imagine retourner quelques kilomètres en arrière expliquer ça à un vieil oncle cultivateur ou bûcheron. «Ouais bin, imagine Anselme que tu sors avec ta hache, et que là tac!, pu de forêt. Tu balances ton outil dans le vide, tu frappes que dalle car y'a pu de forêt. Tu ferais quoi?»

Connaissant Anselme, il aurait certainement dit que le Divin le voulait ainsi, et il serait retourné voir sa bobonne et ses mioches et il aurait enfin rafistolé ce cabanon qui nécessitait ses soins depuis si longtemps. Il perdait pas pied facilement, le bonhomme.

Nous ici on dansait comme des rats un peu cons.

On est un peu cons, ouin.